À la rencontre de Loïc Limbio, l'apprenant Tech Manager qui veut valoriser le design africain
Nos matricien·ne·s sont jeunes ou plus agé·e·s, récemment diplomé·e·s ou en reconversion professionnelle, ils et elles ont des parcours bien différents, mais sont réuni·e·s par l’expérience de formation à Matrice l’École. Et si nous partions à la découverte de nos apprenant·e·s ?
Nos matricien·ne·s sont jeunes ou plus agé·e·s, récemment diplomé·e·s ou en reconversion professionnelle, ils et elles ont des parcours bien différents, mais sont réuni·e·s par l’expérience de formation à Matrice l’École. Et si nous partions à la découverte de nos apprenant·e·s ?
Aujourd’hui, on vous présente Loïc Limbio qui fait partie de la promotion Tech Manager.
Après une carrière dans le secteur bancaire, Loïc, en quête de sens, profite de la crise de la covid pour suivre la formation Tech manager à Matrice l’Ecole. Il y découvre le code et la gestion de projet numérique, mais aussi et surtout un groupe de camarades solidaires qui lui permet d’oser lancer son projet entrepreneurial : African Design Store. Suivez-nous en compagnie de Loïc, un matricien qui a trouvé sa voie en valorisant les talents africains en Europe.
Salut Loïc, tu peux nous en dire un peu plus sur toi ?
Bonjour, moi, c’est Loic, j’ai 34 ans. Je suis né en République Centrafricaine avant de rejoindre la France à l’adolescence afin de poursuivre mes études. Après un parcours universitaire à la Sorbonne, j’ai entamé une carrière dans le secteur bancaire.
Pendant 5 ans, j’ai accompagné des entreprises dans le financement de leurs activités grâce à une méthode appelée l’affacturage: il permet à une entreprise de couvrir ses délais de paiement en lui fournissant un financement à court terme, le temps de recevoir le paiement de ses clients.
J’ai travaillé avec une multitude d’entreprises, PME et multinationales, en France et un peu partout en Europe. Mais après 5 années, je ne me sentais plus à ma place. Je travaillais avec de grandes entreprises (industrielles, notamment) et le job était intéressant, mais je ne trouvais pas de sens à mon travail. J’ai donc pris la décision de partir. Après mon départ, j’ai tenté ma chance en startup en tant que credit manager, mais là encore je n’y trouvais pas tout à fait mon compte. J’étais toujours en phase de recherche quand la covid a frappé. J’y ai vu une opportunité et j’en ai profité pour suivre une formation et acquérir les compétences qu’il me manquait pour m’épanouir professionnellement.
Fasciné par l’univers entrepreneurial et issu du secteur bancaire, je me suis d’abord m’intéressé à la Fintech (secteur d’activité qui déploie la technologie pour améliorer les activités financières, contraction de « finance » et de « technologie). Mon expérience professionnelle et personnelle m’avaient rélévé le décalage entre le secteur bancaire traditionnel et les attentes des clients de nos jours. J’étais curieux de poser un autre regard sur ce secteur à travers l’approche des startups. Mais j’étais également très attiré par l’ESS (l’économie sociale et solidaire). Encore mon besoin de sens, j’imagine. J’ai alors compris que c’était entre les nouvelles technologies et les sciences sociales que se trouvait mon équilibre.
Pourquoi as-tu rejoint Matrice l’École ?
C’est un mélange d’intuition et de circonstances. Je savais que le secteur digital m’attirait. Mais j’étais également attiré par l’entrepreneuriat et les sciences sociales. Quand je suis tombé sur Matrice, j’ai tout de suite su que c’était ce qu’il me fallait; un organisme qui allie mes trois centres d’intérêt: le digital, l’entrepreunariat et les sciences sociales.
Quel programme suis tu à Matrice l’École ?
Je suis la formation Tech Manager qui a débuté en novembre 2020. C’est un programme complet qui me forme au développement informatique et à la gestion de projet numérique.
Que retiens-tu après 8 mois de formation à Matrice l’École ?
Ce que j’ai vraiment aimé, c’est tout d’abord l’aspect hyper complet de cette formation : on y apprend le développement informatique, mais également la gestion de projet, l’entrepreneuriat (grâce à un module entrepreneurial), la prise de parole en public, le Design Thinking etc. L’objectif n’est pas de devenir un développeur lambda, mais d’avoir une vision globale et critique d’un projet numérique et du secteur digital en général.
La formation est adaptée aux novices et cette porte d’entrée généraliste dans l’univers du digital nous permet d’appréhender réellement nos futurs métiers. La plupart des formations proposées sur le marché sont des formations très courtes et purement opérationnelles. Il s’agit de coder, sans discontinuer pendant 2-3 mois, sans comprendre l’organisation et les enjeux d’un projet numérique. Personnellement, je voulais comprendre l’univers du digital : les différents métiers et leur articulation, les méthodes de travail, les outils, les enjeux technologiques et sociétaux. C’est ce que j’ai pu faire à Matrice.
D’autre part, j’avais aussi envie de découvrir le monde des startups, ayant moi-même une fibre entrepreneuriale. Or l’écosystème Matrice comprend également un incubateur. Cela semblait être l’environnement idéal pour moi. Grâce au module entrepreneurial inclus dans la formation, j’ai pu travailler aux côtés de 7 personnes sur la réalisation d’un projet d’entreprise que j’avais en tête depuis 2 ans.
Enfin, ce que je retiens de la formation, c’est l’aventure humaine : nous n’avions, pour la plupart, aucune base en développement informatique. Nous venions de secteurs très divers et nous avions des parcours de vie totalement différents. Pourtant, nous avons appris et progressé ensemble. Grâce aux AT (ou ateliers de tissage), ces temps d’échange hebdomadaires sur nos expériences d’apprentissage et de vie, nous avons pu échanger sur les difficultés rencontrées au cours de la formation. Nous avons également appris à tirer partie de nos parcours uniques afin d’enrichir notre réflexion et notre démarche professionnelles. Finalement, la formation nous a permis d’apprendre ensemble, mais également les uns des autres.
Peux-tu nous parler de ton projet et de son évolution depuis ton arrivée à Matrice l’École ?
Ce projet a émergé il y a quelques années. À cette époque, je venais de signer mon 1er CDI et depuis mon installation en France, j’avais enfin l’opportunité d’emménager dans un appartement non meublé. J’étais enthousiaste à l’idée de l’aménager et le décorer à mon goût. Pour cela, j’étais à la recherche de pièces africaines authentiques. Malgré une recherche intensive, je ne trouvais pas d’éléments de décoration qui reflétaient mon vécu et mes goûts : je ne tombais que sur des pièces stéréotypées, datées et parfois même offensantes (porteuses d’une vision primitiviste de l’Afrique qui m’agaçait sérieusement). J’avais également souhaité commander directement à des créateurs inspirants situés en Afrique et qui correspondaient davantage à mes envies, mais aucun n’effectuait de livraison en France ou alors à des tarifs exorbitants.
C’est à ce moment-là qu’est née l’idée. Le continent africain regorge de talents immenses : un écosystème de créateurs et de designers reconnus parfois à l’international, mais souvent dans des cercles fermés (comme celui des collectionneurs d’art contemporain) et surtout, cet écosystème est peu connu voire ignoré en France. L’Afrique souffre encore malheureusement d’une image passéiste, qui doit être réactualisée. Mon objectif est donc de faire entrer la créativité africaine dans les foyers français et internationaux.
L’African Design Store (ou ADS) sera donc un site e-commerce d’inspiration africaine dédié à l’univers de la maison qui met en relation des designers africains et une clientèle internationale. Ces pièces authentiquement africaines issues de tout le continent seront disponibles sur cette plateforme de référence.
As-tu déjà réfléchi à ta cible ? Qui pourra s’offrir une pièce à ADS ?
La question de la cible a été un vrai dilemme pour moi, tant en termes de stratégie qu’en termes d’exécution. Je voudrais rendre ces objets accessibles pour démocratiser le design africain, mais il ne s’agit pas non plus de s’aligner sur Ikea. Les pièces sélectionnées sont souvent faites mains, généralement en petites séries et font appel à un savoir-faire local et demandent du temps. Tout ceci a un prix et surtout, de la valeur.
De plus, selon moi, pour actualiser l’image de l’Afrique, le premier stéréotype à combattre est celui de la pauvreté et par association, l’idée selon laquelle tout ce qui vient du continent africain serait de peu de valeur. La question de la création de valeur est essentielle. L’Afrique est très dépendante de l’exportation de ses matières premières, mais celles-ci sont rarement transformées sur place : la création de valeur se fait surtout en dehors du continent. C’est pour cela que je veux proposer un prix juste : pour valoriser la création de valeur faite sur le continent africain.
Pour répondre plus précisément à ta question, je vois 4 groupes de personnes qui seraient intéressées par l’offre d’ADS:
- les afrodescendants: ce sont les descendants d’immigrés africains (deuxième et troisième génération). Davantage diplômés, ils représentent une classe moyenne afrodescendante émergente, en quête de liens avec l’Afrique et qui souhaite avoir dans leurs intérieurs une ou deux pièces qui parlent de leur racines;
- les aficionados de l’Afrique: toutes les personnes qui ont vécu, voyagé ou travaillé en Afrique et qui en gardent une certaine nostalgie. Elles sont en quête d’authenticité et souhaitent que leur intérieur reflète les pays qu’ils ont visité ou dans lesquels ils ont vécu;
- les amateurs de design: tout ceux qui sont quête de nouveauté, de singularité et d’exceptionnel;
- les curieux de déco: qui souhaitent juste se faire plaisir avec des objets originaux
Où en es-tu sur l’avancement d’ADS ?
J’avance pas à pas sur ce projet même si je ne précipite pas les choses. J’ai commencé à nourrir une présence sur les réseaux sociaux, notamment sur Instagram avec le compte african_design_initiative.
Le module entrepreneurial proposé par Matrice dans le cadre de la formation m’a également permis un gain de temps inestimable, car j’étais accompagné par une équipe.
Concomitamment à la stratégie de communication et au plan marketing, il me faut travailler sur les aspects logistiques qui sont cruciaux. Il faut réfléchir au meilleur moyen d’acheminer ces objets dans de bonnes conditions depuis l’Afrique sans imposer des frais de port exubérants aux acheteurs. Il me faut aussi penser aux modes de livraison et à la législation dans les zones géographiques où j’aimerais proposer les produits d’ADS puisque ce projet a une vocation internationale.
Par ailleurs, grâce à la formation, je suis capable de travailler sur le développement de la plateforme e-commerce, quitte à être accompagné par des experts qui pourront me guider par la suite.
Merci Loïc d’avoir répondu à nos questions, tu as une dernière information à ajouter ?
Dans le cadre de la formation Tech Manager, je recherche un stage de 2 à 6 mois à partir du 2 août pour valider mon diplôme, idéalement comme UX ou en gestion de projet (j’aime le contact).
Pour le développement d’ADS : j’aurai sûrement besoin d’être incubé afin de me lancer officiellement. J’envisage sérieusement d’être accompagné par Matrice pour la phase suivante de ce projet. Mais avant tout ça, il me faudra valider ma formation Tech Manager grâce à un stage de 2 à 6 mois. Si vous entendez parler d’une opportunité en tant qu’UX designer ou chef de projet sur Paris ou proche banlieue, je suis preneur !